Comme un arbre…

Sarâ Julia Rodrigue

En prenant ma marche ce matin dans un petit chemin de campagne où nul véhicule ne vient troubler la paix, je laissais s’imprégner en moi la vibration des arbres… Ils m’ont toujours fascinée, interpelée, inspirée…

Au fond, ils ne sont pas si différents de nous, êtres humains, et leur mouvement est comparable au nôtre. Je regardais ceux qui, comme moi, en sont peut-être à leur 70e rotation autour du soleil. Ils en ont les marques sur leur peau, des marques qui laissent deviner les rigueurs des saisons tout comme les rides sur un visage ou les courbatures dans le corps.

Combien de fois, l’écorce avait-elle craqué pour que l’arbre croisse? Avait-il souffert dans cette expansion? Est-ce qu’un arbre, ça souffre?… Combien de fois avais-je fait craquer mes limites, mes croyances dans des expériences douloureuses, mais qui, au bout du compte m’avaient permis de mieux comprendre la Vie, d’expanser ma conscience ou d’ouvrir encore plus mon cœur.

Certains avaient des protubérances sur leur tronc provoqué par je ne sais quoi… D’autres des branches cassées, ou des têtes coupées… Certains étaient presque tombés, mais un autre les avait retenus. J’y voyais ma vie et mon corps qui n’était plus celui de mes 20 ans. J’y voyais ma vie et les Êtres qui m’avaient soutenue alors que j’étais presqu’à tomber…

On est au printemps, les feuilles n’ont pas encore poussé et la forêt est toute nue révélant sans pudeur les attaques de l’hiver. J’y vois la sagesse de mes 69 ans qui n’a plus rien à prouver et qui a compris que toutes les expériences vécues font ma richesse.

On est au printemps, c’est indiqué au calendrier, mais il n’est pas réellement là. Le vent fort et froid souffle sur les nuages presque toujours présents nous obligeant à rester à l’intérieur, à continuer à être avec soi plutôt qu’à commencer à se tourner vers l’extérieur. On se plaint de la température, mais serait-il possible que Mère Terre nous invite à continuer cette introspection? À reconsidérer encore plus devant les paysages dénudés de notre humanité, ce qu’il y aura à reconstruire, comme devant mon terrain où je vois tout ce qu’il y aura à faire ?

Chaque hiver, les arbres laissent aller ce dont ils n’ont plus besoin et chaque printemps se parent de leurs plus beaux atours et ceci, encore et encore dans le mouvement de leur vie.

Un plan divin est à l’œuvre dans ce passage collectif et individuel, voire cosmique, nous n’en voyons pas l’envergure, mais il s’agit bel et bien d’une transition vers une humanité nouvelle axée sur les Lois du Vivant. Qu’avons-nous à laisser aller?

J’habite dans une érablière au bord d’un lac et ces grands compagnons m’entourent de leur aura protectrice. Je les vois changer leur costume au fil des saisons, mais jamais ils ne m’abandonnent. Comme ces amitiés fidèles qui, malgré la distance ou le temps, seront toujours là.

J’ai parcouru plusieurs lieux sur notre magnifique planète et toujours les arbres m’ont enseigné. Lors d’un périple initiatique en Égypte, j’ai connecté très fort avec un arbre. C’était un temps de ma vie où je cherchais qui j’étais vraiment et me demandais où était ma vraie place. Sur cette île au milieu du Nil, il y avait de merveilleux arbres à fleurs rouges ou jaunes. En m’approchant d’un immense Acacia qui m’attirait plus que les autres, j’entendis ce message qui reste à jamais gravé dans mon cœur :

     « La magnificence d’un Être ne brime pas celui d’un autre Être. Quand chacun brillera de toute sa splendeur, l’humanité sera réalisée. Regarde comment tous ici, nous déployons notre essence et ensemble, nous chantons la Vie! »

Sur le bord de cette petite route du Québec, je ramasse quelques petites cocottes tombées de ce grand pin, comme les fruits de ma vie, perles de sagesse et d’amour, récoltés dans des passages d’accouchement de parties de moi. Elles portent ma signature unique et authentique. Elles servent de semences à un nouveau cycle plus conscient, ouvert sur une nouvelle poussée, une nouvelle étape de vie.

Le cycle des saisons est sans fin… Alors que certains me verront comme à l’hiver de ma vie, puisque d’une certaine façon mon écorce a peut-être l’air de ça, mon cœur vole toujours dans la joie de mon printemps et mon âme elle,  vole dans l’immensité du non-temps…

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4 réflexions sur “Comme un arbre…”

  1. Ginette Desjardins

    Bonjour ,
    c’est un plaisir de vous lire et de pouvoir apprécier votre sensibilité .
    Merci

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