La vie plus que tout!

Josée Durocher

Je suis née il y a un an maintenant.  Oui, j’ai pris la décision de vivre en juin de l’an dernier.  Cela faisait des mois que j’étais habitée par la dépression.  Pourtant, la vie m’est soudainement apparue comme la seule option possible.

Oh, je n’étais pas sortie du bois!  La dépression était toujours présente dans ma vie, mais j’ai décidé de la voir pour ce qu’elle était, c’est-à-dire une invitée opportuniste qui n’était que de passage.

On ne se met pas à tout redécorer notre maison lorsque du monde, arrivé à l’improviste, se plaint que la couleur des murs ne lui convient pas!  Non!  On sourit et on fait le choix d’ignorer les remarques désobligeantes tout en remettant gentiment à sa place ce monde qui se mêle de nos affaires.

J’ai adopté la même attitude avec la maladie mentale qu’est la dépression!  Je me suis adressée à elle comme on s’adresse à un enfant gâté.  Je lui ai dit de se tenir tranquille, de prendre son mal en patience et lui ai rappelé qu’elle pouvait très bien me quitter si ma vie ne lui plaisait pas.

Oui, j’ai carrément interpellé ma dépression en me faisant à moi-même la promesse que, comme toutes les émotions que je peux vivre, elle allait m’habiter un temps et me quitter un jour.

Je ne mentirai pas en disant qu’il ne suffit que de lui dire de se tenir à carreaux pour qu’elle se tienne tranquille!  Ce que je dis cependant, c’est que de lui donner toute l’importance dans mon existence est devenue chose du passé.

Comment?  Oui, comment fait-on pour classer la dépression au second plan lorsqu’elle veut prendre toute la place?  En se remémorant tout ce qui nous a fait sourire un jour :  les naissances, les joies, les étreintes, les baisers déposés sur nos joues et ceux qu’on a offerts aux joues des autres, la tendresse, l’amitié, l’amour…

Je ne suis pas meilleure qu’une autre, non.  Mais en donnant une identité à ma maladie, j’ai, à l’époque, pu m’exprimer à elle sur tout ce qu’elle me faisait vivre contre mon gré.

J’ai même poussé l’exercice plus loin en lui écrivant.  Je lui ai écrit des lettres de haine.  Je lui ai écrit des lettres où je l’invitais à me quitter, en vain.  Je lui ai écrit des mots pour lui démontrer que je me situais dans la compréhension de sa présence dans ma vie… le pourquoi du pourquoi.

Et, à bout de forces, je lui ai écrit une lettre d’amour où je la remerciais d’être passée et restée longtemps en moi.  Et c’est là, et c’est là seulement, que j’ai ressenti un réel soulagement.  La dépression m’était envoyée par la vie elle-même afin que j’apprenne sur moi-même plus que jamais!

J’ai donc appris que j’avais outrepassé mes limites, moi qui ne m’étais donné que très peu d’importance.  J’ai appris que je faisais toujours passer les autres avant moi sans égard à mes nombreux besoins pourtant irrémédiablement importants.

J’ai compris que je ne m’aimais pas comme j’étais destinée à m’aimer.  J’ai compris qu’à toujours faire maintes pirouettes, les autres ne nous estiment pas davantage.  J’ai compris que si j’étais si souffrante, c’était que j’étais prête à recevoir tous ces messages.

J’ai alors entrepris un long périple intérieur de recherche de soi.  J’ai donc été à ma rencontre profonde et j’étais ébahie de constater qu’il restait encore de la vie à l’intérieur de moi.  Peu, mais juste assez pour rebondir et pour m’élancer vers la guérison.

Le chemin vers cette guérison était parsemé d’embûches de toutes sortes.  J’ai trébuché.  J’ai eu mal.  J’ai pleuré, j’ai crié et je me suis souvent découragée.  Mais toujours brûlait en moi cette flamme qui ne s’était jamais éteinte.

Aujourd’hui, lorsque j’y pense, je respire un bon coup.  Ça sent la liberté car je ne suis plus liée par les chaînes de la maladie.  J’ai consenti à la laisser m’habiter un long moment.  En fait, suffisamment longtemps pour qu’elle m’apprenne tout ce qu’elle devait m’apprendre!

Et, un beau jour, elle est partie sans prévenir, un peu comme elle était venue.  Je me suis sentie comme quelqu’un qui doit réapprendre à marcher ou encore qui sort d’un long séjour en prison et qui doit réapprendre les règles.

Et ce sont mes lois, les miennes, qui prédominent maintenant.  Alors, j’écoute. J’écoute tout de moi.  Du plus doux soupir aux cris de joie, tout ce que me dicte mon âme est important.

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