Plus de 60 000 pensées traversent notre esprit chaque jour.
60 000, c’est énorme, pensez-y ! Ce qui est beaucoup plus dérangeant c’est d’apprendre que les travaux du professeur Daniel Amen de Californie ont permis de démontrer que plus de 48 000 de celles-ci étaient négatives! Nous avons donc 80% de pensées négatives au quotidien, et plus de 95% de nos pensées du jour sont également identiques à celles de la veille. Il y a là de quoi nous faire réfléchir n’est-ce pas ?
Quel impact ?
Ces pensées surgissent dans notre esprit de façon tellement automatique que nous n’y prêtons pas toujours très attention. Pourtant, un tel dialogue ininterrompu n’est pas sans conséquence et toutes les sphères de notre vie en sont affectées tant au niveau physique, émotionnel, cognitif que comportemental. Il y a de quoi être fatigué en fin de journée !
Nous avons tendance à blâmer les événements extérieurs pour nos réactions et pensées négatives. Et pourtant, ce ne sont pas les événements qui entraînent des conséquences indésirables tant au plan émotionnel que comportemental, mais bien la perception que l’on en a et la signification qu’on leur attribue.
Simple comme ABC !
Voici comment les choses se produisent :
A | B | C |
Événement |
Pensées/Croyances |
Émotion/Comportement |
A – Tout d’abord, il est important de bien identifier l’événement sans donner notre opinion, ce qui est parfois bien difficile. Par exemple, si l’on a croisé Jacques et qu’il ne nous a pas salué, nous avons souvent tendance à dire : « J’ai vu Jacques ce midi et il m’a complètement ignoré ». Pourtant ceci n’est pas un fait, mais plutôt une opinion/interprétation. Le fait ici est que Jacques ne nous a pas salué lorsque nous l’avons croisé.
B – Il s’agit d’identifier toutes les pensées qui nous ont traversé l’esprit au moment exact où nous avons croisé Jacques qui ne nous a pas salué. Il est important de ne pas se censurer. Selon notre bagage émotionnel, différentes pensées pourraient nous traverser l’esprit :
« Voyons-lui, pour qui il se prend ? On sait bien, il me reconnaît juste quand ça fait son affaire… »
« Il se fout de moi, je le savais, j’aurais donc dû m’écouter »
« C’est clair qu’il se fout de moi, qu’il essaie donc de me rappeler voir, il va apprendre c’est quoi se faire ignorer »
« Mais qu’est-ce que je lui ai fait ? C’est de ma faute, je n’aurais pas dû lui parler de ça l’autre jour ».
Et etc.
Ces pensées que nous avons de façon automatique sont souvent erronées. Le problème n’est pas d’avoir des pensées erronées, car cela nous arrive à tous. Le problème surgit quand ces distorsions nous amènent dans des émotions négatives qui, elles, nous amènent à adopter des comportements et à tirer des conclusions où nous nous faisons du mal.
C – Ainsi les émotions que pourraient nous amener les pensées ci-haut pourraient amener de la tristesse, un sentiment de trahison, de rejet, de la rancune, des idées de vengeance, de l’incompréhension, de blâme à son endroit. Cela pourrait amener différents comportements aussi comme un repli sur soi, des pleurs, l’élaboration d’une stratégie de vengeance, un appel ou un message enragé à l’endroit de Jacques, et, etc.
Vous comprenez le principe ? Oui, mais ensuite ?
En résumé :
- Jacques ne m’a pas salué lorsque je l’ai croisé
↓
- On sait bien, il me reconnaît juste quand ça fait son affaire
↓
- Je suis très en colère 8/10
→Je rentre chez-moi enragé et je suis bête avec tout le monde.
→J’écris un courriel haineux à Jacques pour lui faire part de son attitude inacceptable et lui dire de ne plus compter sur moi à l’avenir.
La réalité : J’apprends que la journée où j’ai croisé Jacques, il venait tout juste de terminer un appel avec sa femme à qui on venait d’annoncer un diagnostic de cancer du sein de stade IV et il était totalement sous le choc et dans sa bulle. Maintenant je dois composer avec les conséquences de mes actions impulsives amenées par mes pensées erronées…
Identifier les catégories de pensées nuisibles
C’est lorsque nous vivons des moments difficiles et négatifs qu’il importe de s’attarder à son discours intérieur et d’analyser ces pensées. L’idéal est vraiment de le faire par écrit. Les pensées nuisibles se classent en différentes catégories dont voici les principales :
- Les généralisations excessives : conclure que lorsqu’un événement s’est produit une fois, il se répètera. Former une « règle » basée sur un très petit nombre d’événements.
-> exemple : « Tous les hommes sont des salauds ».
- La pensée en noir et blanc : classer les choses en 2 catégories, sans nuances.
-> exemple : « J’ai raté mon entraînement ce soir, je n’y arriverai jamais ».
- La lecture de pensée : tendance à prétendre connaître ce que les autres pensent de nous en l’absence de preuve.
-> exemple : « Il a lu mon message, mais ne m’a pas répondu, je le savais qu’il s’en foutait ».
- Les erreurs de prévision : prévoir le pire et se convaincre que les faits nous confirment notre hypothèse.
-> exemple : « Ils sont toujours ensemble, c’est évident qu’ils sont en amour ».
- L’étiquetage : Tendance à se dénigrer au lieu d’utiliser des termes réalistes.
-> Exemple : « Je suis nulle dans ça moi ».
- Les exigences : Perception inappropriée d’une obligation morale, les « il faut » et les « je dois » que l’on s’approprie ou encore que l’on approprie aux autres.
-> Exemple : « Il n’a pas le droit de me parler comme ça ».
Il existe plusieurs autres catégories et elles varient un peu selon leurs auteurs. Toutefois, je vous ai partagé les catégories que l’on retrouve le plus souvent. Si vous désirez en apprendre davantage, n’hésitez pas à consulter les travaux de Aaron Beck et d’Albert Ellis.
Apprendre à réfuter ses pensées erronées
Lorsqu’on a réussi à identifier nos erreurs de pensées, il faut accepter avec humilité de les remettre en question de façon objective. Ce n’est pas toujours facile mais il faut se rappeler qu’on le fait pour nous et pour une meilleure qualité de vie à tous les niveaux.
Prenons l’exemple de Jacques ainsi que la pensée « On sait bien, il me reconnaît juste quand ça fait son affaire » qui engendre une émotion de colère évaluée à 8/10. Notre but ici est de recadrer cette perception afin de faire diminuer l’intensité de l’émotion négative et d’éviter à notre personne fâchée de poser un geste non justifié qu’elle pourrait regretter.
Dans un tel exemple, ça paraît évident qu’il existe une probabilité que ce ne soit pas exact au premier abord n’est-ce pas ? Et pourquoi cela nous parait-il si évident ? Tout simplement parce que nous ne sommes pas impliqués émotivement dans la situation. En faisant l’exercice avec vos propres pensées qui seront pour vous des certitudes, vous verrez que c’est un tout autre défi.
Voici le genre de questions que l’on pourrait se poser pour réfuter cette pensée :
- Est-ce que j’ai la preuve de ça ?
- Suis-je absolument certain de ça ?
- Qu’est-ce que je dirais à une amie qui me dirait cela ?
- Y a-t-il une autre façon de voir la situation ?
- Et si c’était vrai, est-ce que cela serait si grave ?
-
-
Il est important ici de comprendre que la réfutation de pensée ne consiste pas à annuler ou à renverser complètement notre pensée, mais plus à l’adapter à la réalité.
Il ne s’agit pas de se dire : « Jacques m’a ignorée, mais ce n’est pas grave », mais plutôt d’arriver à quelque chose qui ressemblerait à : « Jacques ne m’a pas salué ce midi. Ça me fâche quand j’ai l’impression que quelqu’un m’ignore, mais peut-être qu’il ne m’a pas vue ou qu’il était réellement dans la lune, même si ce n’est pas l’impression que j’ai eue. Je vais lui demander la prochaine fois que je vais le croiser. », donc, l’émotion de colère à 8/10 ici pourrait se transformer en contrariété à 5/10, ce qui est déjà une nette amélioration.
Il faut pratiquer !
Bien qu’il soit assez aisé de comprendre ces notions à l’écrit, cela ne suffit pas à vous aider à apporter de réelles modifications à vos schèmes de pensées. Rappelez-vous ces 48 000 pensées négatives au quotidien ainsi que toutes émotions négatives que cela vous fait vivre, soit dans vos relations avec autrui, soit dans votre relation avec vous-même, la personne la plus importante de votre vie. Gardez un petit carnet près de vous et exercez-vous à utiliser le modèle ABC lorsque vous rencontrerez de nouvelles frustrations ou que vous serez tenté de vous autosaboter.
Si vous désirez approfondir cette technique ou encore être accompagné pour le faire, j’offre des ateliers à cet effet. Écrivez-moi pour en savoir davantage !
Marie-Hélène Dubé
Moment présent